La Facilitation des voyages, élément clé du Développement touristique
La Facilitation des voyages, élément clé du Développement touristique
Les experts de l’industrie reconnaissent que la facilitation des voyages est étroitement liée au développement du tourisme et contribue de façon décisive à l’attrait général d’une destination, se traduisant par une demande accrue et une performance soutenue du tourisme. La facilitation des voyages est un terme large qui définit l’ensemble des services et infrastructures qui permettent au visiteur potentiel de se déplacer de son point d’origine à la destination. Toutefois, aux fins de cet article, on mettra l’accent sur les aspects qui peuvent être gérés et/ou contrôlés par les destinations respectives. Il s’agit entre autres des politiques et frais de visa, de la réglementation des voyages et des taxes de voyage, et des processus et services pertinents en matière d’immigration.
Les organisations régionales comme l’Association des États de la Caraïbe (AEC) mettent de plus en plus l’accent sur le besoin pour les pays de s’attaquer aux politiques de visas, de voyages et d’imposition archaïques susceptibles d’entraver la croissance de l’industrie des voyages et du tourisme. Plus particulièrement, pour les pays de la Grande Caraïbe, les efforts de l’AEC visent à fournir des informations sur les meilleures pratiques, systèmes et processus actuels ainsi qu’à promouvoir la coopération et l’échange de connaissances entre les pays en vue de la normalisation et harmonisation des politiques et processus d’immigration et de visa au niveau régional.
À l’échelle internationale plus large, l’Organisation mondiale du Tourisme des Nations Unies (OMT) et le Conseil mondial du Voyage et du Tourisme (CMVT), deux organisations touristiques mondiales clés qui cherchent à sensibiliser le public sur ce thème en tant que priorité d’importance mondiale, ont publié de nombreuses études et rapports pour évaluer la situation actuelle des régimes et procédures de visa et la possibilité de créer des solutions pour faire avancer la facilitation des voyages.
Conformément à ces rapports, les pays de la région d’Amérique latine et des Caraïbes figurent parmi les plus ouverts de l’hémisphère et ont fait des progrès considérables, soit en mettant en œuvre des mesures d’« exemptions de visa » et/ou de « délivrance de visas à l’arrivée », qui ont contribué à la croissance remarquable du secteur du tourisme. Les accords multilatéraux qui exonèrent mutuellement toutes ou certaines catégories de voyageurs de l’exigence de visa sont particulièrement notables. Toutefois, il existe des domaines d’amélioration importants qui restent sous-utilisés, tels que la possibilité d’optimiser l’utilisation de technologies de l’information et de la communication pour améliorer les procédures de visa et d’immigration.
Il convient aussi de noter que si plusieurs pays ont mis en place des systèmes conviviaux pour faciliter les voyages de croisière, des mesures similaires se font attendre dans le domaine des voyages aériens commerciaux. Plusieurs voyageurs évoqueront sans doute les difficultés liées au transport aérien en général, y compris au déplacement au sein de la région. Cela peut être attribué en grande partie aux règlements imposés par les compagnies aériennes et les autorités internationales de l’aviation civile, tels que les nouvelles restrictions de bagages, les contrôles de sécurité intrusifs et longs, ainsi que les longues queues et les retards de voyage. Toutefois, certains facteurs relevant de la compétence des pays peuvent bénéficier d’une plus grande efficacité et convivialité.
La réalité actuelle est que les voyages au sein de la région sont entravés par des politiques de voyage strictes qui rendent les voyages moins désirables et plus coûteux. Les voyageurs, aussi bien les habitants locaux que les touristes, doivent dans la plupart des cas s’acquitter d’une taxe sur la valeur ajoutée (TVA) en plus du prix du billet d’avion, ainsi que de taxes d’arrivée et/ou de départ, et d’autres charges et droits ambigus liés au voyage à la destination. Ces mesures sont utilisées par plusieurs pays dans la région et dans le monde entier en tant que moyen de génération de revenus. Toutefois, plusieurs experts de l’industrie affirment qu’en rendant les voyages plus abordables il existe un potentiel d’accroître le volume en termes de nombre de visiteurs se rendant à la destination et par conséquent les recettes provenant des dépenses au niveau national. Il existe une valeur ajoutée car les recettes générées peuvent atteindre le double de la somme qui aurait été perçue en taxes et droits d’entrée.
Le transport aérien reste le moyen le plus commode et rapide de voyager, notamment pour les visiteurs internationaux, et les taxes et droits coûteux ont un effet dissuasif notamment pour les voyageurs de loisirs et dans certains cas peuvent contribuer à rendre les voyages inabordables. Un défi primordial pour chaque destination touristique concerne la manière de rendre son produit attractif et abordable. Pour les pays de la Grande Caraïbe, dépendants du tourisme, qui cherchent à rester compétitifs et à accroître leur part d’arrivées et de recettes touristiques, une révision des politiques fiscales et des taxes et droits associés aux voyages aériens est fortement recommandée.
Il existe également des systèmes réglementaires, tels que les procédures d’immigration et de douane, qui méritent d’être examinés. On constate dans plusieurs pays à travers la région, que ces procédures d’entrée restent fastidieuses et archaïques. Dans ce domaine, la modernisation des infrastructures aéroportuaires et l’introduction de systèmes d’entrée informatisés et de scanners mécanisés, bien qu’ils soient coûteux, constitueraient des investissements utiles. Le facteur humain est aussi une composante clé qui ne doit pas être ignoré. L’expérience dans les aéroports représente souvent la première impression que les touristes se font d’un pays et s’ils éprouvent des difficultés, des retards, des coûts élevés ou un manque d’amabilité au moment de passer par l’immigration ou la douane cela peut influer négativement sur leur perception ultérieure. L’importance de la formation pour inculquer au personnel d’aéroport le besoin d’offrir un service amical et courtois, tout en maintenant les plus hauts niveaux de professionnalisme et d’efficacité est cruciale.
Les politiques de voyage, processus de visa, procédures d’entrée et autres règlements sont employés à juste titre par les gouvernements pour assurer la sécurité, contrôler l’immigration et limiter l’entrée, la durée du séjour ou les activités des voyageurs, et peuvent être un moyen de contrôler le tourisme et les investissements. Par conséquent, il n’est pas suggéré qu’elles soient supprimées dans leur intégralité mais plutôt passées en revue dans le but de les mettre à jour, améliorant ainsi leur utilité et efficacité aussi bien pour les gouvernements que pour les visiteurs.
L’OMT affirme précisément qu’afin de profiter pleinement des bénéfices socioéconomiques du tourisme international pour un pays, il est nécessaire de mettre en place les conditions qui rendent le pays attirant et compétitif, dont la plus importante concerne la facilité d’accès au pays. À cet égard, il est important de noter que certains pays (y compris plusieurs États membres de l’AEC dans la région) ont introduit des initiatives visant à encourager et à faciliter l’accès des visiteurs. Parmi les exemples on peut citer les incitations à l’investissement touristique, les budgets de marketing accrus et les politiques de visa favorables, telles que :
- L’exemption de visas et le déplacement sans obligation de visa pour les citoyens de certains pays ;
- La simplification des procédures de demande de visa par exemple la délivrance de visas à l’arrivée ; et
- La réduction ou annulation des frais de visa.
Toutefois, il reste beaucoup plus à faire et il est encore plus important d’assurer la rationalisation à travers l’ensemble des pays de la région. Un récapitulatif des études de l’OMT et du CMVT sur la Facilitation des voyages permet de tirer des conclusions importantes qui méritent d’être examinées. Aussi, en guise de suggestions pour améliorer l’expérience des voyages vers et entre les pays de la Grande Caraïbe, on peut prendre en compte les aspects suivants :
(i) Il s’avère nécessaire d’améliorer la transmission d’informations sur les formalités d’entrée, y compris les exigences et procédures de visa. Les informations devraient être accessibles sur les sites des pays et ceux des Ambassades ou Consulats et doivent être exactes et à jour.
(ii) Il conviendra d’accorder une priorité à l’amélioration des systèmes et processus d’obtention de visas. Le processus de demande, la période d’attente, ainsi que les exigences liées à cette procédure peuvent être améliorés à l’aide de technologies modernes comme la mise en place de programmes de visas électroniques.
(iii) L’utilisation de mesures de traitement différenciées peut être étudiée. Ces dernières peuvent inclure l’adoption de politiques et de procédures différentes en fonction de la durée du séjour et du but de la visite, comme la réduction des restrictions pour les visiteurs en transit ou séjournant une nuit et l’établissement de processus tendant à soutenir et à encourager le tourisme Multidestination, etc.
(iv) Poursuite d’Accords de facilitation des Visas. Il existe plusieurs Accords commerciaux au niveau sous-régional et entre différents groupes de pays au sein de la région de la Grande Caraïbe qui facilitent les voyages et doivent donc être applaudis. La stratégie actuelle devrait consister à poursuivre des accords multilatéraux avec les pays identifiés comme les principaux marchés émetteurs au sein de l’Amérique latine, ainsi que les puissances économiques croissantes des pays du BRICS – le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud. Cela peut être poursuivi en tant qu’initiative dans le cadre de l’AEC ou à travers la conclusion d’« accords réciproques » individuels par les pays.
Il est estimé que la mise en œuvre d’un ou de plusieurs aspects précités peut produire des rendements considérables en termes de visites, de recettes touristiques et d’emplois pour les économies locales, bref assurer la croissance et le développement futurs de l’industrie du tourisme.
Amanda R. Charles est la Conseillère en Tourisme durable de l’Association des États de la Caraïbe. Veuillez adresser vos correspondances ou commentaires éventuels à feedback@acs-aec.org