La connectivité dans la Grande Caraïbe

L’AEC DANS LA GRANDE CARAÏBE

 

La connectivité dans la Grande Caraïbe

 

Bien avant que le navigateur génois Cristóbal Colón ou Christophe Colomb, tel que nous le connaissons, tombe dans la région lors de son expédition en Asie parrainée par l’Espagne, le transport et par ricochet le commerce entre les peuples était une activité florissante dans la Grande Caraïbe. Avec une Mer des Caraïbes n’ayant que 350 milles de large, la navigation de la région par bateau était loin d’être un concept étranger.  Les premiers peuples, les Tainos et les Caraïbes, avaient des réseaux qui allaient des Bahamas vers le sud, à travers les îles, et à partir de ce qu’est actuellement le Guyana et le Venezuela vers le nord.  Le commerce était une partie intégrante de leur culture qui favorisait non seulement les échanges de biens et de marchandises, comme les poteries, l’or et les femmes, mais aussi la création d’alliances.

 

Le voyage réalisé par Colomb en 1492 et l’évolution ultérieure des voyages triangulaires entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques, ont changé la portée et la nature du transport dans toute la région et, en réalité, dans le monde entier.  Pendant cette période, la région devint un centre névralgique crucial dans le contexte de la scène commerciale mondiale et moyennant le développement continu des ports, elle est n’a perdu d’actualité que bien tard dans le XX siècle. 

La question de la connectivité a cela, que pendant les périodes du colonialisme, de l’indépendance et plus récemment du régionalisme, elle a continué d’être un aspect crucial du paysage régional.  Etayé par l’idéal de la coopération régionale, le transport est devenu un pilier central de l’Association des Etats de la Caraïbe, car il offre un espace à la facilitation des échanges, des investissements et du mouvement des personnes entre pays traditionnellement isolés.  

 

Toutefois, les expériences relatives au transport dans la Grande Caraïbe sont marquées par un degré de divergence.  En premier lieu, il y a les îles de la Caraïbe, unies par un héritage colonial commun, ayant de petites populations et, dans de nombreux cas, une langue commune, l’anglais, mais qui sont séparées par la mer.  Ces économies reposent sur des importations de l’Amérique du Nord et de l’Asie et leur production économique est fort dépendante des services, comme le tourisme et les banques extraterritoriales.  Par conséquent,  l’accessibilité aérienne de toute la région a une importance primordiale, mais représente certainement une activité coûteuse, en raison de la contrainte structurelle de la petite taille.  Par ailleurs, cette réalité de la ‘petitesse’ est juxtaposée aux grands pays hispanophones qui constituent la plus grande partie des 240 millions d’habitants de la Grande Caraïbe.  La grande taille des pays d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud, unis tout aussi par une langue commune, mais étendus sur une masse de terres contiguës, quoiqu’avec des différences topographiques, a permis un mouvement plus facile des personnes et des marchandises, moyennant l’établissement de liaisons de transport aérien viables, à faible coût, au sein des pays et entre ces derniers.

 

Malgré le cadre réglementaire strict dans lequel ils fonctionnent et la restriction de la concurrence, la nature du marché a conduit à l’agglomération de lignes aériennes latino-américaines en groupes, ce qui leur permet de tirer profit des économies d’échèle et de réduire le coût de l’accès fourni.   La création du groupe Avianca-Taca, du groupe COPA et du groupe LAN en témoigne.

Les gouvernements insulaires ont pris une approche différente.  Puisque la structure économique et la géographie des îles exige un service efficace, de nombreux gouvernements ont choisi de maintenir des compagnies aériennes d’Etat dans l’intention de préserver le transport aérien dans leurs territoires en faveur du tourisme.  Ainsi, à l’exception de l’union récente de Caribbean Airlines et d’Air Jamaica, les lignes aériennes qui desservent le marché intrarégional et en grande partie les îles, sont demeurées comme entités séparées, avec très peu de coopération au sein du marché.

 

De façon similaire, le transport maritime rencontre son propre ensemble de défis, bien que différents des sujets qui ont une incidence sur le transport aérien.  La dépendance de la Caraïbe du transport maritime pour le commerce est logique, étant donné son héritage et l’espace commun de la Mer des Caraïbes.  Pendant la période subordonnée aux règles coloniales, des ports ont été créés pour favoriser l’exportation de marchandises en vrac vers  la métropole et la réception de biens fournis. La dynamique changeante du commerce mondial a fait apparaître maintenant que l’infrastructure portuaire existante ne pourra pas suivre le rythme d’un marché, qui requiert des ports plus grands et plus profonds pour recevoir le nouveau genre de navires qui vont bientôt circuler par le Canal de Panama.  L’élargissement du Canal de Panama engendre une grande motivation, mais il est aussi source de quelques inquiétudes.  Toutefois, la Grande Caraïbe renferme un potentiel important en ce qui concerne des volumes supplémentaires et les activités de transbordement. 

 

Compte tenu que plus de  90% des échanges dans le monde voyagent actuellement par mer, quelques états régionaux ont fait de forts investissements en infrastructure portuaire, dans l’intention stratégique de  tirer parti de leur emplacement géographique, en offrant leurs services comme centres portuaires mondiaux de transbordement, et de plaques tournantes portuaires sous-régionales.  Le restant des ports fonctionnent en fournissant des services portuaires qui couvrent les besoins économiques internes.

 

En dépit des inquiétudes surgies dans le domaine des liaisons de transport, les Etats membres de l’AEC ont reconnu le rapport crucial qui existe entre connectivité et développement.  Le résultat de la coopération régionale a conduit l’AEC à entreprendre une série d ‘initiatives conçues pour aborder certains de ces aspects contrariants du transport.  Une de ces initiatives est l’établissement d’un accord de transport aérien qui fournit le cadre juridique dans lequel les pays membres peuvent entamer des négociations entre eux, pour fournir davantage d’options de services aériens, avec une réduction des coûts et des prix, ainsi qu’un plus grand nombre de routes. On prévoit que cet accord de coopération sera complémentaire d’autres outils disponibles, comme l’Accord multilatéral de Services aériens de la CARICOM (MASA) et l’Accord multilatéral de Libéralisation du transport aérien international (MALIAT).

 

Dans le domaine du transport maritime, des projets comme les Cartes de Routes maritimes de la Grande Caraïbe visent à fournir de l’information sur les acteurs de l’industrie de transport maritime et à faciliter les liaisons commerciales entre les pays, tandis que celui de la Stratégie maritime et portuaire de la Caraïbe cherche à fournir une stratégie complète pour le développement de ports dans la région.  D’autres projets qui sont en train d’être abordés par l’AEC, visent à traiter la question de la pollution marine et espèrent aussi examiner les services maritimes régionaux offerts aux passagers. 

 

Six siècles après le voyage de Colomb, la région fait encore face à des défis concernant l’avenir de ses économies dans le contexte du commerce mondial.  Les voyages et, par extension le commerce, rencontrent encore des entraves dans la région  en raison du manque de liaisons de transport efficaces et abordables. Il faut reconnaître que sans l’amélioration de ces services, la coopération fonctionnelle et par extension, le progrès vers le régionalisme, vont certainement chanceler.    Le but de la connectivité au sein des pays de la Grande Caraïbe doit être abordé comme une question d’urgence ou bien nos risquons de trouver nos fortunes échouées sur les rivages sableux de la Mer des Caraïbes.

George Nicholson est le Directeur de Transport de l’Association des Etats de la Caraïbe. Toute correspondance ou commentaire peut être envoyé à feedback@acs-aec.org